Pourquoi il est essentiel de maximiser les opportunités de circularité dans les matières premières pour le Pacte vert européen
L’économie circulaire vise à éliminer la production de déchets tout en optimisant la réutilisation et le recyclage des produits et matériaux existants. Face à des coûts énergétiques élevés, l’Europe doit saisir toutes les opportunités d’économies d’énergie en renforçant la circularité des matières premières. Voici pourquoi.

Ces dernières années, l’industrie européenne a été fortement impactée. La pandémie de COVID-19 a perturbé les chaînes d’approvisionnement mondiales, entraînant des pénuries de matières premières critiques, indispensables à la réussite du Pacte vert pour l’Europe.
Avec la guerre en Ukraine et ses répercussions sur les prix de l’énergie, l’Europe fait face à une menace croissante : une dépendance accrue aux importations de matières premières stratégiques. Cela compromet sa compétitivité et sa résilience industrielle à long terme.
L’accès aux matières premières, un pilier du Pacte vert européen
Certaines matières premières sont tout simplement essentielles. Leur rareté, combinée à leur importance pour les technologies vertes, en fait des éléments clés pour atteindre les objectifs climatiques et industriels de l’Europe. Sans un approvisionnement sûr, abordable et durable, le Pacte vert ne pourra être mis en œuvre avec succès.
Dans le secteur de l’aluminium, que je représente, ce défi est particulièrement visible. L’aluminium est un matériau fondamental pour une économie verte et numérique : léger, durable et surtout recyclable à l’infini, sans perte de qualité.
Selon l’Institut international de l’aluminium, la demande mondiale en aluminium devra augmenter de 70 à 80 % pour atteindre les objectifs climatiques de l’Accord de Paris. Cette croissance est principalement portée par les secteurs de l’automobile, du bâtiment et de l’emballage.

La crise énergétique provoquée par le conflit en Ukraine a gravement touché les producteurs européens d’aluminium. Depuis l’automne 2021, plus de 50 % de la capacité annuelle de production d’aluminium primaire a été arrêtée ou réduite, ce qui illustre à quel point cette production est énergivore.
Or, recycler l’aluminium ne nécessite que 5 % de l’énergie requise pour sa production primaire. Il est donc crucial de maintenir l’aluminium déjà en circulation dans la boucle économique et d’éviter que cette ressource précieuse ne soit perdue ou exportée.
Plus de recyclage, de traçabilité et de collaboration tout au long de la chaîne de valeur
Dans ce contexte, trois éléments sont essentiels.
Premièrement, chaque année, environ un million de tonnes de déchets d’aluminium quittent l’Europe. Compte tenu de l’intensité énergétique de la production d’aluminium primaire, cela revient à exporter une énergie précieuse hors du continent. Il serait donc préférable de recycler ces déchets localement et de les transformer en nouveaux produits, afin de soutenir efficacement la transition écologique européenne.
L’aluminium est un élément clé car il est infiniment recyclable et peut être utilisé sans limite.
- Roland Scharf-Bergmann, responsable du centre d'excellence en recyclage
Deuxièmement, en tant qu’industrie, nous avons également la responsabilité de collaborer étroitement avec nos clients pour accompagner la transition vers une économie circulaire. Cela passe par une transparence accrue et une communication claire sur l’empreinte carbone de l’aluminium recyclé.
Et troisièmement, chez Hydro, nous sommes convaincus qu’il est essentiel de reconnaître que tous les aluminiums recyclés ne se valent pas.
Lorsqu’il est issu de fenêtres ou de pièces automobiles en fin de vie, l’aluminium recyclé entame une nouvelle vie. Ce type de matériau, appelé « rebut post-consommation », présente une empreinte carbone proche de zéro. En revanche, l’aluminium recyclé provenant de chutes de production — le « rebut pré-consommation » — est différent. Il résulte d’une inefficacité du processus de fabrication, n’a pas encore accompli sa vie utile et conserve donc l’empreinte carbone de sa production initiale. Ne pas en tenir compte reviendrait à ignorer une partie des émissions liées à sa fabrication.
La transparence est essentielle: il est crucial de savoir où et comment l’aluminium est produit.
Vous vous demandez peut-être pourquoi la distinction entre déchets pré-consommation et post-consommation est si importante ? Justement parce qu’elle permet d’assurer cette transparence, en rendant visible l’origine et l’impact environnemental réel de l’aluminium recyclé.

Hydro teste actuellement un projet pilote basé sur la blockchain (anglais) pour retracer le parcours de ses produits tout au long de la chaîne de valeur. Cela favorise la circularité en rendant visible l’empreinte carbone et le contenu recyclé de l’aluminium.
Une transparence sectorielle peut être assurée grâce à l’introduction de passeports produits numériques contenant des données vérifiées. L’adoption d’une méthodologie standardisée pour le calcul de l’empreinte carbone, reflétant la réalité physique, est également essentielle. Ces mesures garantiront une traçabilité fiable du contenu recyclé et une évaluation précise des émissions.
La proposition de règlement de la Commission européenne sur les produits durables, actuellement en discussion, inclut ces passeports numériques. Elle pourrait stimuler la demande de produits circulaires et bas carbone, tout en aidant les consommateurs à faire des choix éclairés. C’est une opportunité unique pour lutter contre le greenwashing et promouvoir une véritable économie circulaire.